Un des grands avantages d’être grand-père c’est de pouvoir mener des activités d’enfant sans qu’on vous demande si ça va bien dans votre tête.
J’imagine, en effet, la réaction de ma femme si je lui avais proposé d’aller visiter la citadelle de Dinant et sa plaine de jeux, d’y monter en téléphérique malgré le vent, d’aller ensuite manger une boulette sauce tomate avec des frites ou un spaghetti bolo et de passer l’après-midi en croisière sur la Meuse sur le pont d’un bateau-mouche, sous la pluie.
Et bien, j’ai fait tout cela aujourd’hui, et bien plus, sans qu’on n’y trouve rien d’anormal puisque j’étais accompagné de mon petit-fils Awen. Quelle excursion, quelle journée, quelle aventure. Entre chevaliers en armure, soldats allemands à casques à pointe et bateliers en vareuse rayée à la Jean-Paul Gaultier.
Tout d’abord, premier frisson, nous avons franchi en voiture, sans encombres et sans griffer la carrosserie, l’étroit passage du rocher Bayard. La dernière fois que j’étais passé par là, c’était en car scolaire il y a bien plus d’un demi-siècle et je me souviens que le chauffeur avait dû rabattre ses rétroviseurs pour ne pas toucher les parois rocheuses. Ensuite, quelques palpitations cardiaques dans le téléphérique qui monte à la citadelle, le vent est fort et la cabine balance. Nous ne sommes que deux à bord et pas rassurés du tout, mais la vue est superbe et nous ferons un « beautiful selfie » que nous garderons en souvenir rien que pour nous deux.
La visite de la citadelle est impressionnante à plusieurs titres : la construction est imposante, sévère et spectaculaire. Elle nous fait un peu penser à Fort Boyard. De nombreux canons et boulets de toutes tailles sont encore là dans la grande cour de la garnison. Nous soulevons un des plus petits boulets et nous nous rendons compte combien c’est lourd. On se regarde et on se dit que ça devait faire du dégât quand on en recevait un sur la cafetière.
Dans les salles sombres et humides de la citadelle, nous découvrons une remarquable expo (dessins, photos, films en noir et blanc) sur la guerre 14-18 relatant le dramatique mois d’août 1914 qui ensanglanta la ville. Horribles combats à la baïonnette qui firent plus de 1000 victimes aussi bien du côté allemand que français (l’armée belge n’était pas à Dinant mais bien à Liège et Namur, les autres endroits où les Allemands pouvaient traverser la Meuse). Et surtout l’affreuse fusillade-génocide de 674 civils (hommes, femmes et enfants) en représailles de soi-disant attaques de francs-tireurs. L’expo est poignante, Awen et moi sommes bouleversés, mais au dernier panneau illustrant les ombres de soldats allemands nous nous sommes quand même relâchés pour la photo-souvenir.
Après la visite, nous retrouvons Mamie qui était restée en bas dans la ville pour flâner dans quelques magasins et la Collégiale. Nous choisissons un resto plus pour la vue qu’il offre sur le fleuve que pour sa carte sommaire. On s’en fout, des boulettes et des spaghett’s, nous on trouve ça chouette. Et là, comme aujourd’hui on a tous 8 ans, Mamie et Awen dessinent sur la nappe en papier et moi dans mon petit carnet en attendant de pouvoir embarquer sur le bateau-mouche. Leurs croquis sont trop bien (normal pour une prof de dessin et un élève doué), on les gardera donc aussi rien que pour nous. Vous ne verrez donc que le mien.
La croisière de l’après-midi sera très belle bien que mouillée, le décor des rochers et des forêts qui bordent la Meuse est tout simplement sublime. De temps en temps, le commandant de bord attire notre attention sur une abbaye bucolique au bord de l’eau, un pont en pierres de l’époque romaine, le joli château de Freyr et les falaises du même nom où l’on distingue quelques alpinistes accrochés.
Il a plu, on n’est pas partis loin, mais c’était bien.