Je pars en Corse ce week-end. Je prépare déjà mon sac. Plus je prends de l’âge, plus cela prend du temps. Je fais et refais des listes pour ne pas oublier mes trucs et mes machins, mon portable, mon câble, mon rasoir (alors que je m’en fous), mes carnets (dont je ne me fous pas) et bien sûr ma collection de médicaments (j’ai déjà vérifié 3 fois la boîte à biscuits métalliques qui les héberge). J’ai toujours été un peu maniaque, là maintenant, je suis devenu complètement obsédé.
Mais LE truc je ne dois vraiment pas oublier, c’est la liste d’adresses des personnes à qui j’ai promis d’envoyer une carte postale. Parce que, oui, je continue à envoyer des cartes postales. Même si je sais qu’on vit à l’époque des SMS, de Messenger, de Whatsapp ou encore de Skype. Mais comme disait l’autre, qu’est-ce qu’on fera quand on sera vieux et qu’on voudra retrouver nos lettres d’amour si on ne communique plus que par écrans interposés ? ET quoi avec nos photos digitales qu’on envoie par Facebook ou Instagram ? Qu’est-ce qu’on fera quand on voudra se rappeler comment c’était quand on était jeunes et beaux ? Moi, je continue à imprimer et archiver systématiquement quelques clichés par vacances et événements familiaux que je colle ensuite dans un album numéroté. J’en suis à plus de soixante. Mes petits-enfants adorent fouiner dans ces archives. Et moi aussi d’ailleurs. De même dans les boîtes à chaussures où je conserve les vieilles lettres. Celles de ma maman surtout. Quand je vivais au Canada, par exemple, elle m’envoyait chaque semaine quelques pages de sa belle écriture illisible me racontant les petits riens de sa vie. Comme le chantait Charles Trenet « il suffit d’un regard, d’un aveu, d’une chanson pour comprendre l’amour, il suffit de ces riens pour faire des beaux jours… » C’est d’elle, de son habitude de noter son quotidien, que m’est venue il y a une dizaine d’années, l’idée de ce blog constitué aujourd’hui de près de 3000 billets de riens, 3000 petites cartes postales envoyées de mon quotidien (selon l’expression empruntée à mon ami Georges Lafleur, dont le blog – moins prolifique mais beaucoup plus poétique que le mien – est joliment intitulé Cartes Postales, allez le lire, il est génial).
Quand je suis en voyage, j’envoie toujours une carte-vue de l’endroit, un joli panorama, accompagné de quelques mots, à ceux et celles qui me sont chers et qui voyagent peu : le paysage, le timbre, le cachet de la poste… tout cela évoque l’ailleurs, la distance, les nuages, les océans, les montagnes et les déserts traversés par les avions, les paquebots et les trains qui ont transporté les sacs postaux. Et aussi les mains, les yeux et les rêves des postiers chinois, brésiliens, turcs et autres qui ont touché, trié et classé ces courriers.
De même dans ma cuisine, j’accroche au vieux buffet, les cartes postales qu’on m’envoie et quand je prends mon petit-déjeuner, mon regard saute des Alpes où mon petit-fils skiait au début du printemps à la Birmanie où une amie de Marie-Thérèse voyageait il y a quelques semaines.
Je viens de photocopier ma liste d’adresses, il me reste à la glisser dans le bouquin que je vais emporter. Je choisis dans ma pile à lire « Le vieux qui voulait sauver le monde » de Jonas Jonasson (éd. Presses de la Cité) que ma fille m’a offert pour mon anniversaire. C’est un livre qui va bien avec ce billet, non ? Je vous enverrai aussi, promis, quelques billets de Corse.