Archives mensuelles : février 2018

Frimeur

Moins dix degrés affichés sur mon smartphone. Et alors, ça ne fait pas peur à mon élagueur. À 8 heures précises, ça caille dur mais il est là avec son ouvrier, ses échelles et tronçonneuses, il vient toiletter le chêne en façade car ses branches risquent de toucher les fils électriques de la rue. Contrairement à de nombreuses idées reçues, le gel ne gêne absolument pas la taille des branches de moins de 10 cm de diamètre, il ne dérange – éventuellement – que le confort de celui qui taille. Mon élagueur et son pote, je l’ai déjà écrit, le froid ne les atteint pas, ce sont des mecs, des vrais, tout en silence et résistance.

J’ai voulu leur montrer que je n’étais pas encore complètement ramolli : après avoir bu un café avec eux à l’extérieur, « on ne va pas entrer dans la maison, Monsieur Collart, on risque de salir », j’ai ramassé quelques fagots et nettoyé le sol avec eux. Le soleil nous accompagnait, mais seulement pour le look, il ne réchauffait absolument rien, j’ai eu les bouts des doigts gelés après quelques minutes. Depuis mes années au Québec, j’avais oublié combien ça pince… j’ai allumé un feu dans le vieux tonneau rouillé et fait semblant de rien devant les bûcherons.

Mais, à leur sourire, je crois qu’ils ont bien vu que je frimais.

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Silence

Il neige sur le jardin. Silence.

Deux mésanges charbonnières vont et viennent à la mangeoire. Leur vol est ondulant et vif. À tour de rôle, elles picorent quelques graines qu’elles emportent dans le rhododendron où elles ont peut-être déjà trouvé l’endroit où elles nicheront à la fin de l’hiver. Sur une branche du noisetier, un rouge-gorge attend qu’elles soient parties pour plonger de son perchoir au pied de la mangeoire à la recherche de quelques graines tombées, le rouge-gorge, peu acrobate, préfère en effet manger au sol.

Pendant que j’observe, je pense à la conférence à laquelle j’ai eu le bonheur d’assister hier. Aux Aquarellades de Mons qui rassemblent des artistes du monde entier, Yves Fagniart, un grand peintre-aquarelliste animalier, présente son travail et nous fait une petite démonstration en direct. Un reportage documentaire nous explique d’abord ses longues semaines d’observation sur le terrain, caché dans une tente perdue en pleine taïga finlandaise ou savane africaine où il fixe en direct sur le papier, en quelques coups de crayons et de pinceaux, les multiples attitudes du grand coq Tétras, de l’ours brun ou du tigre.

« C’est la passion de la nature qui m’a conduit à l’aquarelle et non l’inverse… » dit-il en esquissant la silhouette d’un ours dans un décor de bouleaux et de taches roses, bleues, jaunes impressionnistes « …et je me sens plus à l’aise seul devant le museau de l’ours qui vient se frotter à mon abri que devant un public de 50 personnes » ajoute-t-il en souriant avant de se taire. Sa conférence sera quasi muette et essentiellement visuelle, ses gestes précis étant plus expressifs qu’un discours, plus fascinants et plus humbles que les mots. J’éprouve beaucoup d’admiration (et d’envie) devant ces vrais artistes, ceux qui font plutôt qu’ils ne disent.

Ceux qui nous apprennent à regarder en silence.

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Richissime

Pour mon anniversaire, ma fille Marie-Noëlle m’a offert le livre de Christophe André Méditer jour après jour, 25 leçons pour vivre en pleine conscience (éd. L’Iconoclaste). Une méthode pour « s’arrêter de faire, de remuer, de s’agiter ». Dois-je y voir un message ? 😉

J’ai commencé sa lecture et j’en suis aux premières leçons qui consistent à s’exercer à prendre conscience, vivre l’instant présent, respirer, fermer les yeux et écouter, observer ses pensées, … Pas évident pour un secoué du bocal dans mon genre mais je fais l’effort. Ce matin, pas de match avec mon petit-fils, le gel a rendu le terrain impraticable, j’ai donc toute la matinée pour mettre mes premières leçons de méditation en pratique.

Après un petit tour sur le marché glacial, j’ai fait une pause « prise de conscience » dans la magnifique Collégiale de Nivelles, le silence et la lumière y étant très inspirants. Après quelques minutes immobiles sur une chaise inconfortable, je ne tiens plus en place et ne peux m’empêcher de me lever pour marcher un peu. Je me dirige vers la Bible ouverte sur un présentoir près de la superbe chaire de vérité sculptée par Laurent Delvaux en 1770. Les livres m’attirent comme des aimants: celui-ci est ouvert au Livre de l’Ecclésiastique, un texte de sagesse juif écrit deux siècles avant JC. Je lis ces quelques mots : « … Il n’est point de richesse plus grande que la santé du corps… ».

Hasard ou Providence ? J’en suis juste à la lecture du chapitre 3 de mon livre de méditation : Habiter son corps. Je ne sais pas si je pratique bien les exercices, et entre nous je m’en fiche un peu, mais je prends soudainement pleinement conscience de mon immense fortune, combien je suis richissime d’être en bonne forme, de n’avoir mal nulle part, d’avoir les joues et les oreilles encore rouges et piquantes du froid qui vient de les taquiner. Et j’ai aussitôt une pensée pour ceux que j’aime et qui n’ont plus cette chance.

Et je remercie ma fille pour ce beau livre. Et aussi le Hasard ou la Providence en levant les yeux vers les rayons de lumière qui tombent des vitraux.

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Outil de travail

– Kevin, voulez-vous éteindre votre smartphone, s’il vous plaît

– …

– Kevin, je répète, merci d’éteindre votre smartphone

– …

– Pour la troisième et dernière fois, veuillez mettre ce smartphone en poche et faites au moins semblant de participer au cours. Qu’y a-t-il donc de si fascinant à tripoter cet appareil depuis vingt minutes ?

– Mais, M’sieur, j’en ai besoin : pour un étudiant en pub, le smartphone est un outil de travail

– Pas à mon cours, Kevin, un cerveau suffit

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Qué calor !

Je viens d’arriver à l’école. C’est la Sibérie ici, un vent glacial balaie le campus, mon iPhone indique une température de -4°. Je me colle au radiateur derrière la vitre qui fait loupe et réchauffe les rayons du soleil polaire qui s’est levé il y a une heure ou deux. Je tiens mon café brûlant à deux mains pour les dégeler. Il est encore tôt, quelques jeunes courageux, grelottant, commencent à arriver au compte-gouttes, tous engoncés dans leurs anoraks, encapuchonnés dans la fourrure synthétique ou le bonnet de laine enfoncé sur les oreilles. J’entends la bise griffer les carreaux.

Soudain, il me semble percevoir une musique d’été, je ne suis plus dans une classe mais au Club Med, un touriste s’amène en sifflotant, les mains dans les poches de son bermuda et les pieds nus dans ses sandales. Je l’ai toujours dit, notre école est un lieu de villégiature, nos cours sont des vacances, nos profs des GO.

Vamos a la Helha, oh oh oh !

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Inspirez, respirez !

 « On ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments » dit l’adage. Je viens de lire la preuve du contraire.

Quand on referme le roman de Paolo Cognetti Les huit montagnes (éd. Stock) on a l’impression de redescendre de haut, de revenir dans la vallée où les fumées et fumisteries de la vie de tous les jours nous étouffent. Là-haut dans les montagnes du Piémont ou de l’Himalaya, les sentiments sont simples, purs, indestructibles. Ils m’ont donné l’envie d’accompagner lentement, sans tourner les pages trop vite, Bruno et Pietro, les deux héros de cette histoire sur les sentiers d’une amitié soudée et parfois secouée par le vent, la pluie, la neige.

Je ne connais pas bien la montagne, je sais qu’elle est belle évidemment, mais j’y ai passé peu de temps dans ma vie. Mes vacances sont plutôt des voyages culturels ou des séjours au bord de la mer, le regard tourné vers le grand large, promesse de rêves et de découvertes.

Avec ce roman, je viens de vivre une expédition intérieure vivifiante. Je ne regarderai plus jamais la montagne avec indifférence, je n’oublierai pas la passion et la langue sublime avec lesquelles Paolo Cognetti la décrit.

Et puis, quelle philosophie de vie dans ces pages, profonde et paisible, fondée sur l’amitié et la plénitude du moment présent dans les alpages ou la caillasse des glaciers : « Il vaut mieux pas trop penser à l’avenir… autrement on devient fou. – Alors à quoi je dois penser ? – À maintenant. Elle est pas belle, cette journée ? ». 

Un vrai bol d’air pur ce livre.

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Écrire pour ne rien dire

J’allume mon portable, apparaît sur mon écran un message intéressant : un site publicitaire que j’aime (enfin que j’ai « liké » une fois !) veut me rassurer en me donnant une information capitale : son nom a changé… sans changer.

Des mots qui ne signifient rien. Qui n’annoncent rien. Qui n’apportent rien.

Bref, une pub pour ne rien dire. Une de plus. Mais qui m’aura quand même fait rire car elle m’a rappelé le fabuleux sketch de Raymond Devos Parler pour ne rien dire dans lequel il démontre que rien… ce n’est pas rien : « Une fois rien… C’est rien! – Deux fois rien… Ce n’est pas beaucoup! – Mais trois fois rien… pour trois fois rien, on peut déjà acheter quelque chose… et pour pas cher!

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Selfie qui rit

Tennis ce matin avec les amis.

Il y a du bon et du moins bon.

Des coups droits tordus.

Des revers à l’envers.

Des smashs qui font splash.

Des lobs qui font flop.

Des balles qui volent dehors.

Et des qui s’écrasent dans le filet.

Il y a aussi des coups réussis.

Des échanges étranges.

Des jolis points.

Des jeux-pas-mal-pour-des-vieux.

Il y a surtout du plaisir.

Et sur le bord du court, des supportrices qui rient.

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Et boum, boum…

… encore un (petit) billet sur le carnaval de Nivelles. J’y ai fait mon tour ce dimanche matin pour aller saluer les Gilles (il paraît qu’il y en a 600) et faire quelques photos. Rien de neuf à raconter depuis mon billet du 24 février 2015 (cliquer ci-dessous). C’est plutôt rassurant : si rien ne change, quand vient le carnaval, cela signifie que le printemps n’est pas loin. D’ailleurs, sous mes pieds qui bougeaient au rythme des tambours, j’ai senti la terre se dégeler.

Bon carnaval et pré-printemps à tous.

https://michelcollart.wordpress.com/2015/02/24/vide/

 

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Critique d’art

Marie-Thérèse nous emmène, mes trois petits-fils et moi, dans un restaurant italien où une de ses amies a accroché quelques-unes de ses aquarelles, entre paysages et abstractions dans les gris et les jaunes.

« Qu’en pensez-vous ? » nous demande-t-elle. « Pas terrible » répondent les gamins. Et Cyril continue « Moi je préfère tes peintures, Mamie, je trouve que tu dessines mieux qu’elle. »

Entre nous, moi aussi.

IMG_8362.jpg    Esquisses et essais pour une nouvelle série d’aquarelles printanières.

Capture d’écran 2018-02-17 à 12.46.09.png                                    Le jeune critique